La gauche haïtienne répond au discours d’Emmanuel Macron : "Restitution et réparation, pas de leçon de morale"


 

Le discours du président français Emmanuel Macron, prononcé le 17 avril 2025 sur les relations entre la France et Haïti, n’a pas laissé indifférentes les figures de la gauche haïtienne. Si certains saluent un timide pas en avant, d’autres dénoncent une tentative de contourner l’essentiel : la question de la restitution de la rançon de 1825 et la réparation des torts historiques. Plusieurs voix progressistes montent au créneau pour réclamer justice.

Dérinx Petit-Jean : "Une reconnaissance symbolique, mais insuffisante"

Pour le professeur Dérinx Petit-Jean, militant progressiste, le discours d’Emmanuel Macron reconnaissant les crimes historiques commis par la France contre Haïti est "un pas vers l'avant dans le combat que le peuple haïtien mène pour la restitution et la réparation".

Cependant, il insiste : "Cela ne suffit pas. Macron doit aller au-delà des déclarations symboliques. Il doit accepter de restituer ce que la France a extorqué à Haïti et de réparer dignement les torts causés. Il ne s'agit pas d’un projet d’assistanat ou de coopération franco-haïtienne, mais d’une responsabilité historique. La rançon imposée en 1825 a laissé des blessures profondes sur les plans social, économique et historique."

Camille Chalmers : "Dans aucune partie de son discours, Emmanuel Macron n’a évoqué la restitution ou la réparation. "

Le professeur Camille Chalmers, porte-parole du parti RASIN Kan Pèp La, souligne l’absence des mots "réparation" et "restitution" dans l’intervention de Macron : "Or, c’est justement l’essentiel pour nous. Il faut que la France restitue la rançon de 1825 et procède à la réparation des crimes historiques contre le peuple haïtien."

Camille Chalmers appelle à l’unité populaire : "Le peuple haïtien doit rester debout comme un seul homme pour exiger justice. Nous ne devons pas céder à la distraction des discours creux."

Il tient également à corriger ce qu’il considère comme une tentative de manipulation historique :

 "Il est important de rappeler que ce ne sont pas les Haïtiens qui ont détruit leur propre pays, contrairement à ce que semble insinuer Emmanuel Macron. Haïti est encore debout, vivante par la résistance de son peuple. Ce sont les politiques criminelles menées par la France et d’autres puissances impérialistes, depuis plus de deux siècles, qui cherchent à étouffer Haïti, à l’asphyxier économiquement et à effacer la mémoire de sa révolution fondatrice de 1804."

L'alter-mondialiste exhorte la population à rester vigilante face à "ces plans macabres visant à effacer la portée révolutionnaire et universelle de l’acte fondateur du 1er janvier 1804".

Hyrvensky Pierre : "1804 n’est pas le fruit de 1789"

Le militant socialiste révolutionnaire Hyrvensky s’attaque, quant à lui, à une autre dimension du discours présidentiel français : l’amalgame entre la Révolution française de 1789 et celle d’Haïti.

 "Il faut le dire clairement : 1804 n’a jamais été le fruit de 1789. Il n’y avait pas de projet anti esclavagiste dans la Révolution française. Les Français n’ont jamais proclamé l’abolition de l’esclavage par principe. Ce sont les esclaves eux-mêmes, par leur mobilisation massive, qui ont accouché de la révolution haïtienne."

Selon le diplomate et étudiant Anthropologie, Macron tente de travestir l’histoire :

"Il veut faire croire que la liberté haïtienne serait une extension de la Révolution française. C’est une falsification historique. Le projet anti esclavagiste, sa concrétisation, son aboutissement, sont l’œuvre exclusive des esclaves haïtiens. Macron passe sous silence leurs sacrifices. Il veut occulter l’histoire réelle pour en faire un récit moral. Mais nous ne voulons ni morale ni symboles : nous exigeons la restitution et la réparation."


Une exigence de justice, pas une faveur

La réponse de la gauche haïtienne au discours d’Emmanuel Macron est claire : la France doit faire face à son passé et assumer ses responsabilités. Le peuple haïtien n’attend pas des mots bienveillants, mais des actes de justice. Ce n’est pas une question de coopération, mais de redevabilité historique. Le combat continue, et pour les forces progressistes d’Haïti, l’horizon reste celui d’un peuple debout, revendiquant fièrement sa souveraineté, sa mémoire et son droit à la justice.



Lominy EDMOND, Journaliste rédacteur/Avocat au Barreau de Petit-goâve, Psycho-énergéticien 

Adresse électronique: voixlibreinfo@gmail.com

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