1825-2025 : Deux siècles d'injustice – Haïti, la rançon de l'indépendance et les racines de l’effondrement social.


En 1825, à peine deux décennies après avoir arraché son indépendance par les armes, Haïti fut contraint par la France à verser une rançon colossale : 150 millions de francs en échange de la « reconnaissance » de son indépendance. Cette somme astronomique, imposée sous la menace d'une flotte militaire française, est aujourd’hui considérée comme l’un des actes les plus cyniques du néocolonialisme.
 

  Un fardeau financier aux conséquences durables

 Pour rembourser cette dette, l’État haïtien a contracté des emprunts à des taux exorbitants auprès de banques françaises. Pendant plus d’un siècle, la majeure partie des ressources du pays a été absorbée par le paiement de cette dette dite « de l’indépendance ». Ce tribut injuste a vidé les caisses publiques, empêché les investissements dans l’éducation, la santé, l’infrastructure et l’agriculture, et a freiné la construction d’un État solide. 

  Une inégalité sociale fabriquée 

L’effort de remboursement a engendré une concentration des richesses entre les mains d’une minorité proche du pouvoir, souvent liée aux anciens planteurs ou aux intérêts étrangers. Pendant que les masses rurales descendants d’anciens esclaves étaient laissées pour compte, les élites haïtiennes, elles, se sont urbanisées, enrichies et parfois compromises avec les puissances extérieures. Ainsi, cette rançon a contribué à créer une fracture sociale durable entre riches et pauvres, entre ville et campagne, entre dominants et dominés. 

  L’effondrement de l’État haïtien

 Privé de ressources, miné par la corruption et les luttes internes pour le pouvoir, l’État haïtien s’est affaibli. Les institutions n’ont jamais pu s’enraciner solidement. L’autorité de l’État a souvent été contestée ou instrumentalisée, et la méfiance du peuple envers ses dirigeants s’est enracinée. À cela s’ajoute l’ingérence internationale constante, souvent justifiée par l’incapacité de l’État à assurer ses fonctions une incapacité elle-même héritée d’une dette injuste.

  L’heure de la restitution 

D'après la Plateforme Haïtienne de Plaidoyer pour un Développement Alternatif (PAPDA) deux siècles plus tard, l’heure est venue pour toutes les couches sociales haïtiennes: étudiants, paysans, ouvriers, intellectuels, de réclamer justice. La France, qui s’est enrichie sur le dos d’un peuple libre, doit restituer cette rançon, avec intérêts. Une dette selon des chercheurs et économistes haïtiens équivalant à des montants allant jusqu’à 115 milliards de dollars si l’on inclut les pertes de développement, d’infrastructure et d’accumulation de capital sur deux siècles.

Ce n’est pas seulement une question d’argent : c’est une question de réparation historique, de dignité et de mémoire. Ce geste permettrait enfin à Haïti de penser une reconstruction sur des bases plus justes et autonomes. 

L’Histoire ne peut être changée, mais elle peut être réparée. Il appartient au peuple haïtien de se lever, uni, pour exiger ce qui lui est dû. 


Lominy EDMOND, Journaliste/Avocat/ Psycho-énergéticien 

Adresse électronique: voixlibreinfo@gmail.com

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